
METAMORPHOSE DES CESARS
«Pendant ce temps où les humains vivent sans qu'une puissance commune ne leur impose à tous un respect mêlé d'effroi, leur condition est ce qu'on appelle la guerre; et celle-ci est telle qu'elle est une guerre de chacun contre chacun.»
Thomas HOBBES (1588-1679)Léviathan, 1651
ESSAI
JULIEN WAKEN (2000)
©JulienWaken Dépôt légal : Septembre 2000. N°639888400.( CL.20)
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« Nous avons appris à écrire n'importe où, sur n'importe quoi, n'importe qui, sans cesse et pas n'importe comment. Et c'est pour cela que nous existons. On nous conseilla de prendre parti plutôt que du recul, afin de ne jamais trahir notre pensée, et nous avons été ostracisés pour avoir osé écrire ces choses qui ne devaient pas l'être, ce qui s'appelle l'expérience. Mais à quel prix ! »
J'assumerai cet essai comme Cassandre, condamnée à prophétiser.
Et puisque le passé aide à comprendre le présent, il ne restait qu'à remonter la pente.
En réalité, le secret de la nature humaine se perd au fond d'un gouffre de misère et de néant. Un fossé, disent certains en faisant peut-être allusion à celui des générations ou des opinions politiques… S'y enfoncer est une aventure périlleuse, car le mal tentaculaire enraciné au fond n'est jamais repu. Sa haine étant inassouvie, il avale quiconque s'en approche pour n'en recracher que quelques-uns qui se mettent alors à corrompre le monde.
C'est ainsi qu'ils se multiplièrent au début, dépourvus d'âme et de conscience, agissant de façon mécanique dans le feu et le sang au nom d'un Dieu issu de leur imagination. Et l'on vit se développer le meurtre et la violence avec l'expansion de la civilisation sur la terre. Des livres sacrés comme la Bible racontent en détail ces guerres fratricides, mais les mots dont nous disposons constituent un langage trop pauvre pour expliquer la véritable cause de nos malheurs.
La tortue a beau expliquer au poisson que l'on ne peut nager sur la terre ferme, il ne la croit pas et agonise sur le rivage…pendant ce temps, les « crises » se succèdent et frappent cruellement encore aujourd'hui les plus défavorisés en les absorbant au fond de ce gouffre sans aucun espoir de retour…
J'ai découvert la belle époque en effectuant des recherches d'archives pour un scénario de long métrage. Un challenge, vu qu'il s'agissait de dévoiler les moyens collectifs utilisés pour éliminer légalement un individu. La technique n'a pas changé. L'ostracisme ne connaissant ni le temps ni les frontières, ma seule obsession était - tout manichéisme mis à part – de faire triompher les laissés-pour-compte…par procuration. Non seulement le cinéma manque de résonateur d'espoir, mais la la médiocrité du son dans certains films français. Philippe Bilger, Président de l'Institut de la parole, aujourd'hui magistrat honoraire, et qui a exercé pendant plus de vingt ans la fonction d'avocat général à la cour d'assises de Paris .déplore depuis plusieurs années ce qu'il qualifie de grande faiblesse technique du son français, que ce soit pour les films et l'audiovisuel et il aurait pu y ajouter les mêmes dysfonctionnements constatés en Belgique, une dérive, dit-il, qui rend littéralement inaudibles certains dialogues ou certains acteurs. Y compris les présentateurs, un "dysfonctionnement" de plus qui n'affecte pas les oeuvres étrangères et surtout pas les films américains qui ont une incomparable qualité de son.
Donc, les archives révèlent qu'à "la belle époque" et même avant, l'on condamnait chaque jour des gens qui donnaient des coups de pieds à un chien alors que l'on décorait le soldat qui tuait un travailleur en révolte. Mais il y avait du brouillard comme on dit autour de ces événements. On avait occulté cette terre déchirée, exploitée, rongée de partout pour mieux l'oublier ainsi que les situations tragiques de ces hommes qui avaient osé manifester leur droit de liberté. De nos jours, il faut une autorisation pour manifester dans les rues…La police prépare ensuite un itinéraire balisé à grand renfort d'autopompes et de paniers à salade et le tout suivi de la balayeuse municipale qui efface toute trace comme si la manifestation n'avait jamais existé…
Je me souviens qu'un jour, des spéculateurs avaient mis au point une méthode radicale pour épuiser un filon. Il leur manquait le plus important : la main d'œuvre. Or, dans cette contrée désertique, les indigènes - en chômage depuis longtemps - auraient accepté de creuser le sol n'importe où, à n'importe quel prix et les investisseurs le savaient.
Le but consistait à extraire du minerai le plus rapidement possible, ensuite de mettre la clé sous le paillasson.
La crise prend ici tout son sens pour ces hommes projetés dans la misère du jour au lendemain et ce n'est ni dans l'unique bordel ni au café du coin qu'ils parvenaient à oublier le piège dans lequel ils étaient tombés. Exploiter l'immédiateté n'est pas sans danger. Les crues aidant, la contrée est devenue un chancre. Les eaux envahissant le chantier le transformèrent rapidement en un marécage très dangereux. Ces régions lointaines qui sont généralement dépourvues de surveillance deviennent rapidement de véritables géhennes. Nous avons aussi les nôtres comme ces terrils jadis entourés de fenaisons - là où Vulcain soufflait les braises de la métallurgie dans un vacarme incessant et la poussière de charbon qui noircissait le paysage entier. Des terres violées, souillées, abandonnées…
J'aurais pu écrire ceci pour n'importe ville, elles se ressemblent toutes avec ce même fossé qui sépare inévitablement les pauvres de la Jet set locale. La seconde classe n'étant qu'un leurre.
C'est souvent du haut des remparts d'une citadelle que l'on découvre vraiment une ville et ses vieux quartiers. Ils ont conservé leur caractère ancestral malgré les guerres et les révolutions. On aperçoit aussi des chalands qui descendent le fleuve comme s'ils narguaient les rives bariolées…
Des touristes venus du monde entier affluent tout au long de l'année Ils s'agglutinent devant des monuments historiques, ébahis d'admiration ou partent à la recherche de leurs racines englouties sous les ruines.
Parfois, une nappe de brouillard tombe lentement comme un linceul ne laissant dépasser que la tête jaune des grues métalliques.
Elles émergent des chantiers perpétuels comme des échassiers cherchant à protéger leurs nids… Ces chancres purulents de boues et de ferrailles tordues grincent et gémissent à longueur de journée…La main d'œuvre est le plus souvent constituée d'étrangers, des immigrés taillables et corvéables à merci qui s'activent dans les tranchées longeannt les routes… acceptant l'inacceptable.
Ce jour-là, étant invité à une réception, je m'étais rendu au bar du treizième étage pour boire un dernier verre. La vue était imprenable, les quelques whiskies ingurgités à la hâte me donnèrent l'impression de planer sur une île aux contours incertains à demi enfouis sous la brume des gaz d'échappement.
Un garçon de café me tira de la torpeur en donnant un rapide coup d'éponge sur la table. C'était un étudiant américain, un black modèle standard. Alors que nos regards se croisèrent, il engagea aussitôt la conversation sur le ton de la confidence en déposant les verres sur un plateau.
— Vous ne trouvez pas cette petite ville manque de verdure ?
— Il n'y a jamais beaucoup de salade autour du steak, avais-je répliqué en souriant.
Ses dents sont d'une blancheur éclatante.
Un homme d'affaires qui était présent à la réception jettait par moments un coup d'œil par la fenêtre en hochant tristement la tête. Il buvait sec.
— Regardez moi ça, me dit-il de loin en prenant un air inspiré, ça fluctue comme le climat - sous un ciel économique sale et gris, aussi terne que le fond de mes sacrés foutus tableaux synoptiques d'opérations financières. Ces clochers et ces tours qui découpent l'horizon en dents de scie ressemblent de plus en plus à un indicateur de crise sur une feuille de données, et en attendant, ce fric, il faut bien qu'il serve à quelque chose, pas vrai ? Alors, on le transforme, on le blanchit pour construire des bureaux qui ne servent à rien… et qu'est-ce que ça donne ? Un chantier permanent ! Un gigantesque jardin d'enfants pour promoteurs…qui s'en mettent plein les poches !
J'aperçois le black dans une embrasure. Il nous observe à distance. Je préfère rentrer avant que la ville ne se métamorphose en un Chicago de bazar peuplé de zombies. Tout bien réfléchi, cette ville ressemble au « vieux Paris » ou aux bas-fonds de Marseille sans dépasser le stade de la caricature franchouillarde. Il y a des chantiers de construction partout. On patauge par endroits dans la boue et les immondices. La plupart des chantiers sont tellement mal balisés qu'on s'y engouffre lamentablement comme dans un labyrinthe. Les entreprises n'engagent plus de surveillants de travaux, et confient ce travail à un ouvrier plus expérimenté que les autres qui accep^tent la mission sans recevoir le salaire qu'il mérite. Trop cher. C'est la crise. On responsabilise un ouvrier et l'affaire est dans le sac. Par endroits, le spectacle est navrant. Décidément, le génie civil n'a plus rien de génial.
La nuit, il est impossible de se perdre à la surface de ce béton qui clignote sous des milliers de luminaires. Je ne reconnais plus la ville… ni sa grande place jadis recouverte de pavés, légèrement en pente, avec des pigeons et des trams… Des rollers et des skateboards offrent un spectacle permanent digne du célèbre Holyday on ice … Des drogués s'agglutinent en agences de voyages temporaires. Certains font la manche. La daube coûte cher… La plupart reçoivent des indemnités qui leur permettent de se poudrer le pif, mais deux jours plus tard, il ne leur reste rien… Les minitrips en planeur font partie du passé. Aujourd'hui, la défonce ressemble à des mises sur orbite du style Apollo XIII sous le regard compatissant de quelques policiers.
Amphét, c'est devenu légal…Tolérance ou désintéressement ? Des mots qui ne veulent plus rien dire. Une telle insolence devrait pourtant égratigner l'intelligence de l'homme de la rue, mais personne ne se soucie de ce genre de chose et chacun vaque à ses occupations, le regard bas, la mine renfrognée, préoccupé par ses petits problèmes…
Ces éternelles provocations n'agacent plus personne.…
On est en droit de se demander si l'on n'est pas en train de dériver vers un paradis artificiel pour certains, une descente aux enfers pour d'autres. Pour un toxicomane, la descente est le retour à la réalité ordinaire pour le cerveau et le corps. Le cannabis sert à rendre la descente plus agréable. C'est tout dire. On est soit pété avec l'alcool, soit défoncé par la drogue. Pour le cannabis, on distingue deux effets : high ou stoned, éveillé ou végétatif. Bref, de plus en plus de jeunes ont le nez dans la moquette…le prolétaire se met au prozac, un antidépresseur à la mode. En attendant, les trottoirs débordent de junkies sous le regard indifférent des flics…Ca dégénère…
Un danger pour la démocratie.
C'est pafois révélateur de se répondre à une invitation regroupant le gratin, on y apprend des choses, l'alcool libère les mots. Pour éviter que la coupe ne déborde, il faut contenir cette énergie dangereuse comme on empêche la vapeur de faire exploser la marmite c'est-à-dire en la laissant doucement s'échapper…dans la drogue, l'alcool, les plaisirs immédiats, l'indolence, et même la violence et la pornographie… Par contre, le jour où l'on se rendra compte que la terre n'est plus qu'un immense cageot de légumes, ce sera le signe que la guerre chimique a commencé et il sera trop tard.
Aujourd'hui, la plupart des places publiques ressemblent à des bunkers ou pire encore des forts, avec des butoirs à la place des tétraèdres en béton pour mieux résister aux assauts… Les architectes qui conçoivent de tels projets ont soit l'esprit dérangé, un goût prononcé pour le macabre ou perçoivent des dessous-de-table, un des convives appelle cela : le brutalisme. La messe est dite.
Un jour, j'ai déposé rituellement une rose rouge sur cette grande place, une rose sur la dalle en béton comme une tache de sang. J'ai fait cela en souvenir du passé sous le regard ahuri d'un vieillard qui distribuait des mies de pain aux pigeons.
— Jadis, il y en avait beaucoup plus, fit-il en me montrant un lambeau de ciel sombre, mais aujourd'hui, ils dérangent… D'ailleurs, tout les dérange ! C'était pas comme ça avant…
— Vous avez raison grand-père, avais-je répondu en prélevant quelques croûtons dans son sachet…C'est le syndrome de la pente. La descente !
A ce moment, il prit un air mystérieux comme pour me confier un secret.
— l y avait des lignes de trams partout et certaines étaient réservées aux convois de marchandises. Un garde-barrière sortait régulièrement de sa guérite pour saluer les gens. On se parlait. Des voituriers en profitaient pour raconter des anecdotes pendant que les enfants caressaient le cheval puis, dès que le train était passé, le passage s'ouvrait de nouveau et chacun reprenait sa route. Je me souviens du tram qui libérait des voyageurs, là-bas. A cette époque la place était bordée de cafés. L'été, les portes et les fenêtres demeuraient perpétuellement ouvertes.
Une enseigne accrochée à un immeuble indiquait l'emplacement d'une écurie. Un charretier y conduisait un cheval d'allège. Sa tête pendait tellement bas que les naseaux frôlaient presque le sol. il avançait lentement, avec la casquette repoussée vers l'arrière, accompagné par le bruit saccadé des sabots. Il faisait tellement chaud ce jour-là que la fumée de sa pipe restait en suspension dans l'air comme de petits nuages. Je venais de rater le tram… et un voiturier se moquait de moi.
Je le revois, là, devant cette porte cochère - Le vieil homme pointe son doigt vers un parking - Il était appuyé contre une berline attelée à deux superbes chevaux.
Tout à coup, je crois apercevoir une silhouette qui disparaît aussitôt dans la cohue…C'est le charretier. Quand je me suis retourné vers le vieillard pour lui confier ma vision, il avait ldisparu… J'étais seul au milieu des pigeons.
J'achète des magazines pensant trouver les réponses à mes questions. Les couvertures sont alléchantes. On s'attend à découvrir des articles engagés, mais je déchante rapidement en lisant des encarts d'une mièvrerie à faire rougir de honte un débile mental. La presse aurait-elle perdu son âme ? Des échotiers locaux encensent leurs élus à qui ils doivent sans doute leur emploi ou leur position sociale. Ca pue l'hypocrisie. Certains tentent désespérément de nous faire croire que tout va bien, mais c'est trop gros à avaler. Ils encensent, se répandent en génuflexion, se célèbrent les uns les autres sans doute par souci de complaisance, par arrivisme… « Tout est beau ! Tout va bien ! » alors que rien ne va plus ! Nous assistons à la fin d'un monde pendant que des idiots nous font l'apologie de la médiocrité !
— Il faut manger bio, me dit une sorte de presbytériens squelettique. Il a adhéré à ce concept comme on entre en religion, il ne boit plus de lait, ne mange plus de viande, plus d'œufs ni de fromage qui contient de la présure de veau ce qui ne l'empêche pas de pester contre la nourriture industrielle qui est en train d'empoisonner une partie de cette planète alors que l'autre crève de faim… En réalité, il y a longtemps qu'on nous fait manger de la merde et que les plus démunis doivent s'en contenter…Il hausse les épaules. Ca le rassure de savoir qu'il mourra en bonne santé. Il sauvait sa vie !
En attendant, ça délinque partout et à tous les niveaux vu que le parquet ne traite même plus les petits délits et - comme s'il venait subitement d'établir une échelle de grandeur au crime - il relaxe les mafieux, qui n'hésitent pas à faire un bras d'honneur aux gardiens de la paix en quittant le commissariat de quartier…
— C'est parce que les prisons sont pleines, dit la rumeur…
Pendant ce temps, les pays « riches » tolèrent les trafics les plus odieux devenant ainsi pourvoyeurs de fonds, expédiant des capitaux aux pays « pauvres », des fous sortis de nulle part descendent dans l'arène et sèment la terreur, et voilà que des réfugiés apparaissent un peu partout…
Quand on sait que la mission principale de tout gouvernement consiste à résorber rapidement les malheurs publics que sont la misère, la faim, les inégalités sociales flagrantes, de façon à enrayer définitivement la violence - car c'est là qu'elle grandit, la violence - on est loin du compte. Il ne faut pas chercher à imputer la responsabilité et l'échec ailleurs qu'au laxisme de certains responsables politiques. C'est devenu un torrent psychique qui emporte tout sur son passage.
De tout temps, il y eut des souverains qui gouvernaient injustement leur Etat, levant des impôts excessifs à leur peuple déjà tellement opprimé, exploité, torturé, persécuté…
Un peuple ne se corrompt et ne dégénère que lorsque les chefs du gouvernement, c'est-à-dire les ministres et les hauts fonctionnaires d'état se corrompent, dégénèrent et deviennent injustes.
Pour qu'un pays soit heureux, il lui faut un gouvernement juste. Or, il n'y a aucune volonté politique ni autre de rendre son peuple heureux, que du contraire, il doit souffrir.
Où en sommes-nous aujourd'hui avec cette morale que trop considèrent à tort comme une utopie ?
Ne sommes-nous pas coupables, nous, les pseudo citoyens, de ne pas exiger que ces élus fassent enfin leur travail plutôt que de remplir les caisses de l'Etat ?
Pourquoi ne tentent-ils pas cette expérience ?
S'ils ne se décident pas à le faire rapidement et non à long terme comme ils se plaisent à le dire, la situation va empirer.
Leurs promesses me font penser à la fameuse prescription que les hommes de loi connaissent si bien, c'est à dire le délai au terme duquel une situation de fait prolongée, devient source de droit. Le ministre des Finances calculant au centime près se met subitement à débiter des projets arbitraires dans dix ou vingt ans – les années ne se comptent plus lorsqu'il s'agit de fixer une date butoir. En effet, au bout d'un temps défini, souvent plusieurs décennies, l'action publique s'éteint en matière de poursuites et de sanctions pénales et pendant ce temps, la violence augmente, comme la misère et les inégalités et c'est dans de telles conditions que l'incivisme devient un crime.
Tant mieux si les villes prospèrent, tant mieux si tout va bien - comme l'écrivent les cacographes - tant mieux pour tous ces jeunes, et moins jeunes, talentueux ou non, qui ne demandent qu'à se révéler, qu'à s'exprimer, qu'à jouer un rôle dans cette fichue société. Après tout, il serait temps qu'on s'en occupe…plutôt que de fabriquer des novas- stars pour le show-business !
La nostalgie est à la mode.
Les livres d'images anciennes se vendent bien. C'est plus facile de se réfugier dans le passé que d'affronter le présent. Et comme le passé se vend bien, on le fait revivre en noir et blanc sous une couverture glacée. Et voilà que tout le monde se prend à rêver en observant les photos de ces hommes rudes et moustachus au regard fier.
La plupart sont d'anciens mineurs avec une ardoise posée devant leurs pieds et portant une inscription à la craie : « 1900, la belle époque… ». Oui, mais pas pour tout le monde.
Nous sommes aujourd'hui en 2018, au milieu d'une place publique, mais nous pourrions nous trouver dans n'importe quelle autre ville, dans n'importe quel autre pays, sur une tout autre place, sur la place d'une grande cité comme celles de jadis qui s'appelaient Sodome, Egypte, Babylone, Rome, la Grande Putain… Celle où l'on rendait hommage au taureau sacrifié incarnant la divinité, où l'on se réfugiait dans des plaisirs extrêmes pour se sentir encore vivant, celle où l'on clouait les chrétiens sur des poteaux, sur des arbres, partout, celle où se donnait de grandes fêtes inondées de bière tiède comme le sang… celle où tonne encore la voix des prophètes exhortant leurs fidèles
— Laissez-les se corrompre ! Ne les empêchez surtout pas ! La fin est proche ! Il ne restera bientôt que des ruines ! Que les pécheurs ne cessent de pécher ! Que les impurs se souillent encore davantage ! Que les justes pratiquent la justice ! La terre va cracher son feu ! Les eaux vont quitter leur lit !…
Et tout recommencera. Il faut bien se rendre à l'évidence : il ne reste rien des grandes cités… Peut-être s'agit-il d'apocalypses…
Que reste-t-il de la Rome impériale, de la bibliothèque d'Alexandrie et de l'Egypte qui n'est plus qu'un désert de sable… ? Ces empires se sont métamorphosés !
Rendu plus attentif aux problèmes de la pollution en général et sous l'intérêt croissant de la population, un beau jour, le gouvernement belge créa un ministère spécialisé. Il attribua donc les Transports et l'Energie au mouvement écolo. Encore une métaphore… Décidément, ou les membres de ce gouvernement ont le sens de l'humour anglo-saxon ou ils excellent dans l'art de se moquer des gens. L'alternative de gérer les principales nuisances et dégradations du milieu naturel, déjà difficile, le sera d'avantage pour les écologistes. La pollution - qui est surtout le problème majeur des grandes villes - ne pouvait laisser indifférents les autres partis qui se mettent aussi à utiliser la thématique écologiste dans leurs discours. C'est la mode !
En France, L'EDF ne parle qu'en termes d'écologie alors que l'entièreté de son programme est nucléaire. Hypocrisie ? Ignorance ? Manipulation langagière ou sens de l'humour ? Tous ne parlent en effet que d'environnement et de qualité de la vie alors qu'ils ne cherchent que la rentabilité d'un système, allant même à faire traverser les villes par des infrastructures gigantesques favorisant tout type de transport.
La pollution est un fléau, comme la drogue, mais revenons plutôt en 1986 où d'éminents savants et biologistes marins mondialement réputés avaient déjà annoncé des catastrophes futures.
Stjepan Keckers le meilleur spécialiste des océans lançait lui aussi son cri d'alarme face à la montée du niveau des océans – mais aucune mesure prise lors de leurs congrès n'a jamais été respectée…
En attendant que les eaux engloutissent Venise, l'opéra de Sydney et le Bangladesh où 15 millions de personnes périront noyées, qui va gober les diarrhées verbales de ces hommes d'Etat qui, même en 1986, parlaient de politique à long terme et qui s'inquiétaient fort peu de la montée de l'extrême droite, dont on parlera quatorze ans plus tard au sujet de Jörg HAIDER. En Autriche, beaucoup trouvèrent à leur goût ce produit testé à grand renfort de promesses et de capitaux d'investissement énormes comme pour un vulgaire produit de marketing. Et le voilà qui apparaît sur les étagères de la chancellerie comme une vulgaire boîte de petits pois. Mais le temps de Hitler est terminé comme celui du Banania et il serait faux de croire que l'Autriche ne retire aucune leçon de son passé nébuleux…Il y a autre chose…
Je me demande pourquoi le gouvernement - qui se fixe généralement des termes à dix ans et plus pour atteindre certains de leurs objectifs - n'a prêté aucune attention à Jörg Haider qui prenait la tête de son parti en 1986 ?
Drôle de gestion prévisionnelle…
Il faut leur laisser le temps aux politiciens, mais ce temps se gâte. De gros nuages dissimulant la foudre approchent...
Les dirigeants internationaux savent pertinemment le rôle que joue l'effet de serre dans ces futures catastrophes, mais il ne faut rien espérer d'eux quand on sait que les mesures de prévention coûteraient des milliards de dollars ou d'euros.
Notre espèce est en péril et ce n'est pas nouveau. Qui oserait affirmer n'avoir jamais lu la Bible, ne serait - ce que les premières pages, le Genèse ? On y parle de l'espèce humaine, un sacré roman historique dont même le cinéma s'est emparé à plusieurs reprises…
Voici le passage de la Genèse 5,25-6,5 qui a surtout retenu mon attention. Dieu en personne proclame : " Je vais effacer de la surface du sol les hommes que j'ai créés , […], car je me repens de les avoir faits." En effet, voyant que leur malice était grande, il entreprit de les dézinguer tous, sans oublier les bestiaux, les reptiles, les oiseaux….
Les 2592 pages qui suivent devraient nous inciter à méditer sur un échec…Au fait, serions-nous le résultat de la plus fabuleuse erreur de la création ?
Je suis de plus en plus persuadé que la majorité des hommes accomplit inconsciemment les desseins du Tout Puissant qui s'est repenti de sa « création » !
On ne démissionne pas face aux difficultés de la vie comme beaucoup trop d'hommes l'ont fait, espérant trouver ailleurs les réponses à leurs questions. C'est lâche ! L'Eldorado n'existe que dans les cerveaux malades de ces voyageurs naïfs en route vers la terre des désillusions… Ils ne feront que saturer davantage un système déjà malade. J
Parfois, mon regard s'évade, au loin, pour se poser toujours au même endroit, sur la façade du vieil immeuble où j'ai vécu. Le soir, les fenêtres éclairées de l'intérieur se détachent comme dans une peinture de Magritte.
Bien que les murs de cette splendide résidence baroque aient été repeins en blanc, le bâtiment a conservé toute sa majesté. La bêtise humaine l'a épargné on ne sait comment...
Jadis, les deux volées d'escaliers en chêne invitaient à découvrir les cabinets et les salons des étages … mais ces logements cossus ne sont plus que des lofts luxueux et vides. Aujourd'hui, des slogans publicitaires du plus mauvais goût ont été placardés à la hâte sur les murs.
Au début du siècle, des événements très graves n'allaient pas tarder à se produire donnant ainsi au développement de l'histoire l'allure d'une véritable descente aux enfers.
Les industries métallurgiques pullulaient, entraînant dans leur frénésie les banques et les coopératives alors que la misère régnait en maître parmi les ouvriers. On voyait s'élever en holocauste des fumées nauséabondes qui tourbillonnaient dans un ciel opaque. Le tintamarre des convois chargés de minerais de fer ou de houille troublait quotidiennement la quiétude du petit matin. Tout rappelait le travail. Les usines devaient tourner à tout prix. Il fallait extraire de plus en plus de charbon. Quand il pleuvait, une poussière tantôt rougeâtre, tantôt noire, transformait les chemins en marécages. Parfois, le vent la chassait en la rabattant brusquement sur le sol, estompant les couleurs tellement jolies du paysage. Tout redevenait gris et sombre comme les vêtements, les véhicules, les murs des bâtiments, la terre, jusqu'au bout de l'horizon déformé par des terrils et les milliers de fumerolles qui s'élevaient par-dessus. Tout n'était que désolation, et même si l'on buvait et chantait des airs dans les cafés, c'était pour mieux oublier ses peines, la souffrance, la misère. Les démunis croupissaient dans de petites chaumières aujourd'hui disparues. Ces masures se regroupaient non loin des puits avec ce sempiternel vacarme de bennes qui se remplissaient et se déversaient inlassablement comme celui des trémies ou frémissait la houille fraîche accompagnée des sonneries qui retentissaient à toute heure. De l'autre côté du fleuve, les hauts fourneaux ne s'éteignaient jamais.
Les nantis vivaient loin de ces rumeurs, loin de cette pollution, de cette morosité. Leurs somptueuses demeures se trouvaient en dehors des quartiers pouilleux. Les pauvres et les riches ne se frayaient pas, au contraire, ils s'ignoraient et quand leurs regards se croisaient, ils se chargeaient mutuellement de crainte et de haine.
Mépris, malhonnêteté, exploitation, cabale, révolte, grèves, famine, mort, étaient bien les principaux mots d'ordre de la vie ouvrière au début du siècle. L'ambition démesurée de ces exploiteurs frustrés cherchant désespérément à imposer leur idéologie branlante me fait penser que le mépris n'est que le luxe des médiocres ! Rien n'a changé. Solidarité, citoyenneté, quelle incohérence !
Ou en est-elle aujourd'hui la collaboration des citoyens avec le gouvernement et que dire du contrôle des revenus - revenus qui, d'ailleurs, ne seraient pas tout à fait conformes à l'intérêt général… ? Mais qui aujourd'hui se soucie encore de ces retards, sans parler de l'évolution des salaires ?
La politique des revenus est née le même jour que la division du travail. Elle était censée évoluer vers une économie de marché...
Il semble qu'elle s'efforce d'agir sur la formation des revenus, mais les inégalités sont de plus en plus flagrantes et les répercussions de plus en plus dramatiques, surtout chez les plus démunis. Les taux de suicide le prouvent dans des régions puissamment développées et industrialisées où cela ne devrait cependant pas exister – un paradoxe supplémentaire. L'objectif d'équité social ne semble donc pas avoir été atteint même si l'on nous garantit un minimum vital. Mais qu'entend-on exactement par minimum vital en cette période difficile et qui en tient vraiment compte ? [...]Entrez votre texte ici...